
Au départ
Dans les principes fondateurs de Scope 22, nous avons inclus la réduction de la vulnérabilité des entreprises aux phénomènes extérieurs via la décarbonation de leur activité. Ainsi, l’entreprise décarbonée devient à la fois moins préjudiciable à l’environnement et au climat via la réduction de ses émissions de gaz à effet de serre et moins sensible aux problèmes de disponibilité et prix de l’énergie. Plus résiliente, pour utiliser le terme à la mode chez les survivalistes et collapsologues de tout bord.
Nous utiliserons par la suite préférentiellement le terme de résistance ou robustesse, plus adapté car il ne s’agit pas de revenir forcément à un état antérieur avant crise (ce qu’implique le concept mécanique de résilience que les mécaniciens connaissent bien) mais bien de s’adapter à un changement inéluctable en cours sans y perdre trop de plumes au passage. Fin de la page philosophie & vocabulaire.
L’approche climat
Dans une activité de bureau d’études comme la nôtre (et notre dernier client en date – c’est ce dossier lié à l’actualité qui a fait germer l’idée de ce post dans mon esprit), une part importante des émissions, de l’ordre de 9%, est due aux déplacements domicile-travail des salariés qui dans une région pas forcément très bien équipée en transports en commun prennent leur véhicule personnel : une voiture à carburant fossile.

Un conseil pour votre compte en banque : passez-la à l’éthanol
Ce poste d’émissions étant relativement important (c ‘est le second juste derrière les trajets professionnels, en vert foncé sur le graphique ci-dessous), nous avons évidemment cherché à le réduire.

Plusieurs approches sont possibles :
Une première consistant à convaincre les salariés :
– de prendre les transports en commun,
– de venir habiter plus près du bureau (ne rigolez pas, à la grande époque l’entreprise Michelin a façonné une partie du paysage clermontois en construisant pour ses employés de pleins quartiers de pavillons urbains avec jardins, à proximité des usines du centre-ville),
– d’acheter une voiture moins émissive,
– de passer au vélo ou à la trottinette électrique,
– de covoiturer.
Et côté entreprise, on pourra :
– mettre à disposition d’une partie au moins des salariés un véhicule moins émissif,
– mettre en place du télétravail
Résumons-nous un peu. La première solution commence par « convaincre les salariés », ce qui va être possible ou pas selon le contexte de l’entreprise, leur sensibilité environnementale, leur lieu de résidence, leur attachement à leur petit confort… Bref, il est difficile d’être certain d’obtenir des résultats fiables et durables de cette manière. La seconde se heurtera très vite, sauf dans le cas d’une activité à très forte valeur ajoutée avec de grosses rémunérations qui peuvent se traduire par des véhicules de fonction, à coût pour l’entreprise. Quant à la troisième, développons-la un peu.
Elle demande un investissement moindre (quelques centaines d’Euros par salarié concerné, pour un PC portable et deux-trois bricoles qui l’accompagnent). Elle permet aux salariés de réaliser une économie de carburant et d’Euros, à l’entreprise d’économiser quelques mètres carrés, aux émissions de gaz à effet de serre de baisser un peu. Et accessoirement elle apporte une résilience intéressante aux activités de l’entreprise en permettant une continuité d’activité en cas de crise type « gilets jaunes » ou « grève des routiers » qui empêche par exemple, l’accès aux stations-service.

(et celle que nous avons concoctée pour notre client en traits pleins – pub !)
Histoire de mettre quelques chiffres sur le phénomène, si on imagine un scénario avec chaque salarié qui fait 20% de télétravail, on économise : 0,20 x 0,09 = 0,018 soit 1,8 % d’émissions. Grosso modo un peu moins de la moitié de l’économie à faire en un an si on souhaite suivre la trajectoire définie par la SNBC (Stratégie Nationale Bas Carbone). Et vu le nombre de petits sujets simultanés à traiter, c’est bon à prendre. Tout cela sans impact sur le chiffre d’affaires et la rentabilité de l’entreprise, ce qui facilite l’acceptation par le patron au passage.
Et le virus ?
Revenons donc sur la résilience qui est le sujet de cet article. Notre entreprise étant partie sur la voie du télétravail, elle a commencé à équiper ses salariés, à mettre en place les logiciels et les habitudes de télétravail, faire des essais, en tirer les enseignements.
Quand soudain, notre beau pays a basculé en trois jours du mode « lavez-vous les mains mais à part ça tout va bien » au mode « état d’urgence la guerre est déclarée et c’est la Lutte Finale ». Donc confinement et tout le monde à la maison à partir du 17 mars à midi pile : on va passer le printemps à l’ombre.
Dans un contexte de quasi panique généralisée, la préparation qui avait déjà été faite a permis de basculer en 48 heures en mode télétravail à 100%, pas si facilement que cela mais ça s’est fait.
Bref, la décarbonation de l’activité amène de la robustesse aux organisations y compris face à des phénomènes qui n’ont pas forcément de lien avec nos problèmes d’énergie et d’environnement. Certains esprits chagrins pourraient objecter que moins de pétrole égale moins de déplacements donc moins de risques de pandémie, ce qui n’est pas faux en première approche sommaire mais constitue un autre débat.
Conclusion
Rendre une entreprise plus résistante augmente sa résistance. Etonnant, non ?
Plus sérieusement, nous avons ici un exemple concret de mesures qui sont destinées à diminuer les émissions de gaz à effet de serre d’une entreprise et améliorer sa résistance dans le cadre d’un contexte énergie-climat, et qui ont un effet collatéral très intéressant. Toute mesure de préparation à une crise permet d’augmenter sa préparation à une autre crise ayant des effets similaires, ce n’est pas un scoop mais cela ne fait pas de mal de le répéter.